« À mon âge, c’était peut-être un peu prétentieux » : Kendji Girac, jeune père, se confie comme jamais dans une autobiographie surprise qui bouleverse ses fans
- Émilien Charvoz

- 19 août
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 24 août
Rares sont les artistes de 29 ans qui osent publier une autobiographie. Encore plus rares ceux qui le font avec autant d’honnêteté, sans s’inventer de légende, sans maquiller les failles ni fuir les zones d’ombre. C’est pourtant le pari audacieux – et profondément humain – que Kendji Girac vient de relever. Révélé au grand public en 2014 grâce à The Voice, le chanteur gitan devenu l’une des figures les plus populaires de la scène française sortira le 1er octobre prochain Mi vida, un livre intime, presque introspectif, où il déroule sa trajectoire, ses racines, son rapport à la musique, mais aussi ses doutes, ses blessures, la paternité qui l’a transformé… et cet incident dramatique d’avril 2024 qu’il avait jusque-là seulement évoqué à demi-mot.

Le titre, Mi vida – « Ma vie », en espagnol – annonce la couleur : il ne s’agit pas d’un livre de star pour faire joli dans une bibliothèque, mais d’un récit qui lui ressemble, simple, franc, parfois brut, à l’image du jeune homme qu’il est resté malgré le succès. Pendant des années, Kendji a refusé ce projet. Il trouvait cela trop tôt, presque vaniteux. « Je me disais qu’à mon âge, c’était un peu prétentieux, que je devais d’abord vivre davantage », confie-t-il. Et puis, la vie s’est chargée de le faire grandir d’un bloc. En quelques années seulement : la naissance de ses deux enfants, une blessure par balle qui a failli virer au drame, une remise en question de son rapport à lui-même, à l’alcool, à la colère, à la célébrité.
Dans ce livre, on retrouve l’enfant qu’il a été : un petit garçon né dans une caravane, entouré d’une famille gitane aimante, vivant au gré des routes, des fêtes, des guitares. Il y raconte le folklore, l’identité, la fierté d’appartenir à cette communauté trop souvent caricaturée. Il parle de ses premiers accords de guitare, joués à l’arrière d’un camion, de ses oncles qui chantaient jusqu’au bout de la nuit, de cet art de vivre fait de liberté mais aussi d’une éducation stricte. Il raconte aussi la peur de décevoir sa famille en partant à Paris pour tenter sa chance, le vertige de se retrouver du jour au lendemain sous les projecteurs… à 17 ans à peine.
La célébrité et le piège de l’image

Pendant longtemps, Kendji a donné l’image du garçon solaire, toujours souriant, toujours de bonne humeur. Il l’était réellement, mais cette lumière cachait parfois des failles. Dans Mi vida, il avoue avoir ressenti un décalage croissant entre ce que le public voulait voir et ce qu’il vivait intérieurement. Les tournées, la fatigue, la pression permanente de rester "parfait", l’envie de prouver qu’il n’était pas juste un phénomène de télé-crochet.
Ce qu’il n’avait encore jamais raconté, il le pose sur le papier avec une sincérité désarmante. Sa blessure par balle en avril 2024, d’abord. Toute la France s’en souvient : un coup qui aurait pu être fatal, un geste impulsif au beau milieu d’une dispute, dans un contexte de surmenage, d’alcool, de tensions personnelles. Il avait brièvement expliqué à la télévision, mais sans entrer dans les détails. Cette fois, il dit tout. Il raconte le choc, l’hôpital, la honte, la peur pour sa famille, sa compagne Soraya, ses enfants. Il raconte la gueule de bois émotionnelle du lendemain, les questions, la culpabilité, l’obligation de se reprendre.
Devenir père : un électrochoc positif
Ce livre est aussi une déclaration d’amour à ses enfants. Père de deux petits, Kendji confie que la paternité a changé sa façon de respirer, de chanter, de vivre. Le jour où il a pris sa fille dans ses bras pour la première fois, il s’est dit que plus rien ne serait comme avant. Lui qui avait toujours vécu entouré, mais libre, a découvert le sens du mot "responsabilité". Il parle du manque de sommeil, des biberons, de la joie pure de jouer au sol avec sa fille. Il avoue aussi avoir eu peur de ne pas être à la hauteur, d'avoir reproduit les erreurs qu’il avait vues autour de lui chez certains hommes du voyage, souvent présents physiquement, mais absents émotionnellement.
Dans Mi vida, il explique que ce rôle de père lui a aussi permis de comprendre ses parents. Il mesure aujourd’hui le courage de leur parcours, leur amour pour leurs enfants malgré une vie modeste. Cette prise de conscience, mêlée à la violence du drame qu’il a vécu en 2024, l’a convaincu d’écrire : pour mettre de l’ordre, pour transmettre, pour se libérer. Il dit avoir voulu livrer sa vérité, sans filtre, sans langue de bois, pour permettre à ceux qui l’aiment – et même à ceux qui ne l’aiment pas – de comprendre l’homme derrière la star.
Kendji ne cherche pas à se faire plaindre. Il ne cherche pas non plus à se donner le beau rôle. Au contraire : dans ce livre, il se montre tel qu’il est, avec ses erreurs, ses excès, son impulsivité. Il parle de cette période où les soirées se sont transformées en dérives, où la fête servait à masquer l’angoisse, où il buvait plus qu’il ne l’avoue en interview. Il dit que sans la musique, il aurait pu mal tourner. Et sans ses enfants, il aurait pu se perdre.

Mi vida, c’est aussi un remerciement à son public. À ceux qui le suivent depuis Color Gitano, à ceux qui ont grandi avec lui. Il veut leur dire : « Vous m’avez vu réussir, mais vous n’avez pas tout vu ». C’est une manière de leur faire une place dans son intimité, de leur rendre ce qu’ils lui ont donné. Loin de la promo habituelle des artistes, ce projet ressemble plus à une confession posée.
Un projet devenu nécessaire
Kendji Girac ne pensait pas écrire si jeune, mais les épreuves l’ont obligé à mûrir plus vite. Il le dit clairement : « Ces dernières années, beaucoup de choses ont changé à l’intérieur de moi. J’ai ressenti le besoin de me livrer, pour que vous puissiez me comprendre vraiment ». On découvre un homme qui doute, mais qui avance. Qui a connu le succès trop vite, mais qui a le courage de le regarder en face. Et qui aujourd’hui aspire à une forme de paix.
Entre les tournées, les festivals et les émissions télé, il trouve désormais son équilibre dans une vie plus simple : la maison, les enfants, le studio d’enregistrement, les amis très proches, l’entourage familial. Il ne fuit plus le silence. Il ne fuit plus ses blessures. Il fait la paix avec lui-même, et cela se sent. Et ce livre en est la manifestation.
La sortie est prévue pour le 1er octobre 2025 chez Flammarion. Les précommandes explosent déjà. Les fans y voient un cadeau inattendu. Beaucoup espèrent y trouver des anecdotes sur The Voice, ses rencontres avec Mika, sa première guitare offerte par son oncle. Ils y trouveront tout cela… mais surtout une confession plus profonde et humanisante.
Mi vida n’est ni un livre de star ni un coup marketing. C’est un récit de vie, avec ses cicatrices, ses lumières, ses détours. Kendji y parle autant de ses tournées triomphales que de ses insomnies, de ses doutes nocturnes, de ses regrets. Il raconte aussi son amour fou pour Soraya, cette jeune femme discrète qui l’aide à tenir le cap et qui l’a soutenu même dans les pires moments. Sans elle, dit-il, il ne serait peut-être plus là aujourd’hui.

Onze ans après sa victoire éclatante à The Voice, Kendji Girac tourne une page et en ouvre une autre devant ses fans. Avec cette autobiographie, il montre qu’il n’est plus seulement le jeune gitan au sourire charmeur, mais un homme en pleine reconstruction, fier de ses racines, fier aussi de ses cicatrices. Il ne prétend pas avoir tout compris ni tout réussi. Il dit simplement : "Voilà qui je suis aujourd’hui".
Ce livre pourrait bien marquer un tournant dans sa carrière. Non pas parce qu’il cherche à faire parler de lui, mais parce qu’il assume désormais pleinement la personne qu’il est devenue. Et c’est peut-être cela, la véritable maturité. À 29 ans, certains diront que cela fait jeune pour un livre de mémoires. Mais quand on lit son histoire, on comprend vite que Kendji a déjà vécu plusieurs vies.


































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