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Herbert Léonar: La voix chaude de la chanson française, et les mots tendres de celle qui l’a accompagné jusqu’au bout

  • Photo du rédacteur: Auriane Laurent
    Auriane Laurent
  • 19 oct.
  • 4 min de lecture

En France, rares sont les artistes capables de faire chanter trois générations sur les mêmes mélodies. Avec Pour le plaisir, Quand tu m’aimes ou encore Amoureux fous en duo avec Julie Pietri, Herbert Léonard a marqué la mémoire collective par sa voix grave, sensuelle et pleine de douceur. Depuis les années 1960, il s’est imposé comme l’un des crooners les plus fidèles à la chanson d’amour, sans jamais céder aux modes ni aux artifices.


Né en 1945 à Strasbourg, il débute dans le groupe Les Lionceaux avant de se lancer en solo et de conquérir un public fidèle grâce à ce timbre unique. En plus de soixante ans de carrière, il a sorti plus de vingt albums, accumulé les succès, et conservé la même passion du chant. Mais Herbert Léonard n’était pas seulement un chanteur : passionné d’aviation, il publia plusieurs ouvrages sur l’histoire aéronautique, partageant sa fascination pour les avions comme pour la scène.


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Le 24 août 2025, la France apprenait avec tristesse sa disparition à l’âge de 80 ans, des suites d’un cancer du poumon. Il s’est éteint quelques jours à peine après son anniversaire, alors qu’il achevait encore l’enregistrement de son dernier album. Celle qui a partagé sa vie pendant près de soixante ans, Cléo Léonard, a accepté d’évoquer ses souvenirs – une conversation intime, pleine de pudeur et d’amour.


« Non, pas du tout, raconte Cléo Léonard. Il était malade, oui, mais encore en pleine forme. Il faisait des galas jusqu’au dernier week-end avant sa mort. Il travaillait sur ses livres d’aviation, sur sa musique, promenait son chien en forêt tous les jours. Il menait une vie tout à fait normale. »


Elle insiste : Herbert n’a jamais considéré ce disque comme un testament artistique. « Il n’avait aucune raison de penser qu’il n’aurait pas le temps de le terminer ou de le sortir. Tout s’est aggravé seulement dans les derniers jours. Il restait trois ou quatre chansons à enregistrer. »


Certains auditeurs ont perçu dans Je voudrais te parler de moi ou Telle fut ma vie un ton de confession, presque de dernier message. Cléo nuance : « Vous avez cette impression parce qu’il est parti après. Mais au moment de l’enregistrement, il ne pensait pas du tout à la mort. Ce n’était pas un disque d’adieu. À 80 ans, malade ou pas, on sait naturellement que ce qui reste à vivre est plus court que ce qu’on a déjà vécu. Faire un bilan devient presque naturel. »


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Les derniers jours ont été soudains, comme le raconte Cléo : « Oui, tout est allé très vite. L’album a été enregistré sans aucun problème. Ce qui l’effrayait le plus, c’était une longue maladie, l’épuisement progressif, la lente déchéance physique. Mais heureusement, tout s’est déroulé en quelques jours. Il est parti paisiblement, sans souffrance. »


Le jour de ses 80 ans, Herbert Léonard se trouvait encore à l’hôpital, mais entouré des siens. « Son petit-fils lui a apporté un baba au rhum, son dessert préféré, avec une bougie dessus. Il lui a dit : “Joyeux anniversaire, papi.” Herbert était très ému. Deux ou trois jours plus tard, il s’en est allé. ». Une fin douce, simple, à l’image de l’homme qu’il fut.


Bien avant ce dernier combat, Herbert Léonard avait déjà frôlé la mort en 2017, victime d’une embolie pulmonaire qui l’avait plongé dans un coma de 35 jours. À son réveil, il devait tout réapprendre : marcher, parler, chanter. Mais il s’en est sorti avec une force qui force le respect.


« Un coma de 35 jours, cela peut laisser beaucoup de séquelles, confie Cléo. Mais il s’est complètement rétabli : son énergie, son esprit, sa passion pour l’écriture – tout est revenu. Après deux mois de rééducation, il avait retrouvé une vie presque normale. »


Cette détermination lui a permis de poursuivre sa route artistique jusqu’à la toute fin, enregistrant encore, écrivant, rêvant. Son dernier album, inachevé mais presque complet, restera comme une ultime trace de sa vitalité et de sa sincérité.




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Tout le monde savait qu’Herbert Léonard avait connu une vie sentimentale mouvementée. Star charismatique dans les années 1970 et 1980, il faisait tourner les têtes. Pourtant, son couple avec Cléo a résisté au temps et aux tempêtes.


« Sans doute la stabilité, répond-elle en souriant. Mais il ne faut pas croire qu’un chanteur est un ange. J’ai été chanteuse, je connais le milieu, les tentations – ces femmes qui cherchent à approcher, à le retenir toute la nuit. Quand on choisit de vivre avec un homme comme lui, il faut savoir accepter. On ne peut pas vivre dans un monde tout rose. »


A-t-elle fermé les yeux parfois ? « Bien sûr. Pendant longtemps, j’ai fait semblant de ne rien savoir, pour protéger notre fille. Plus tard, d’autres raisons nous ont gardés ensemble. Finalement, tout s’est arrangé. Nous nous sommes même mariés après trente-sept ans de vie commune. Un jour, il m’a dit : “Et si on se mariait ?” J’ai répondu : “Si tu veux.” Nous étions déjà un vieux couple. »


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Cléo ne cherche pas à idéaliser son mari : « Comme beaucoup d’hommes, il pensait d’abord à lui, ensuite à sa fille, puis à moi. Je le laissais vivre sa carrière, et moi la mienne. C’était plus simple ainsi. »


Mais au fil de ses mots, transparaît une immense tendresse : « Ce que je veux qu’on retienne de lui, c’est sa voix exceptionnelle. Sur scène, il dégageait une énergie incroyable. Et surtout, c’était un père merveilleux – tendre, attentionné, toujours présent pour sa fille. C’est cela que j’aime le plus en lui. »


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Aujourd’hui encore, ses chansons résonnent sur les ondes et dans les cœurs. Pour le plaisir n’était pas qu’un titre : c’était sa philosophie de vie – chanter, aimer, vivre… pour le plaisir, tout simplement.


Herbert Léonard a chanté l’amour, il a vécu dans l’amour, et il s’est éteint entouré d’amour. Sa voix, son sourire et son humanité, racontés par Cléo Léonard, nous rappellent qu’au-delà de la scène, il y avait un homme vrai : fragile, passionné, profondément sincère.


Son dernier album, resté inachevé, ressemble à sa vie – interrompue mais d’une beauté bouleversante. Et dans chaque note qui résonne encore, on croit entendre sa voix murmurer doucement : « Telle fut ma vie » – telle fut, en effet, sa vie.'



 
 
 

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